La quantité de mouvement en physique
Qu’est-ce que la quantité de mouvement ?
On définit la quantité de mouvement comme le produit de la masse (m) d’un objet par sa vitesse (v) : $$ \vec{p} = m \cdot \vec{v} $$
Il s’agit d’une grandeur vectorielle, car elle résulte du produit d’un scalaire (la masse) par un vecteur (la vitesse).
À la différence de la vitesse, la quantité de mouvement intègre aussi la masse du corps en déplacement.
Pourquoi est-elle importante ?
La quantité de mouvement indique l’intensité de la force qu’il faut exercer pour arrêter un objet en mouvement dans un temps donné.
Pour immobiliser un corps, il faut annuler sa quantité de mouvement. Plus elle est grande au départ, plus la force nécessaire sera importante, à temps de freinage identique.
$$ \vec{F} = \vec{p} = m \cdot \vec{v} $$
Un exemple concret : les glissières de sécurité sur autoroute doivent être dimensionnées pour absorber et arrêter la progression d’un véhicule qui dévie de sa trajectoire.

La quantité de mouvement mesure également l’effet qu’un corps en mouvement exerce lors d’une collision ou d’une interaction.
Une boule de bowling, par exemple, renverse aisément les quilles même à faible vitesse grâce à sa grande masse et donc à sa forte quantité de mouvement. À l’inverse, une balle de ping-pong, même lancée beaucoup plus vite, a un impact négligeable : sa masse infime ne lui confère pratiquement aucune quantité de mouvement.

L’unité de la quantité de mouvement. On l’obtient en analysant les dimensions de la formule : $$ \vec{p} = m \cdot \vec{v} = [M] \cdot [V] = [M] \cdot \frac{[L]}{[T]} $$ Dans le SI, la masse [M] s’exprime en kilogrammes, la longueur [L] en mètres et le temps [T] en secondes. L’unité est donc le kg·m·s-1. $$ \vec{p} = [M] \cdot \frac{[L]}{[T]} = kg \cdot \frac{m}{s} = kg \cdot m \cdot s^{-1} $$ Elle peut aussi s’exprimer en newton-seconde, puisque 1 N = 1 kg·m·s-2 : $$ \vec{p} = [M] \cdot \frac{[L]}{[T]} = (kg \cdot m \cdot s^{-2}) \cdot s = Ns $$ C’est la même unité que l’impulsion d’une force.
Un exemple pratique
Exemple 1
Une voiture de masse $m = 1000 \,\text{kg}$ roule à $v = 20 \,\text{m/s}$ (environ 72 km/h).
Sa quantité de mouvement est de vingt mille kilogrammes-mètres par seconde :
$$ p = m v = 1000 \cdot 20 = 20{,}000 \,\text{kg·m/s} $$
Pour l’arrêter, il faut réduire cette quantité de mouvement à zéro. La force à exercer dépend du temps de freinage $ \Delta t $.
$$ F = \frac{\Delta p}{\Delta t} $$
Si la voiture s’immobilise en $\Delta t = 5 \,\text{s}$, la force moyenne est de 4000 N appliquée pendant 5 secondes :
$$ F = \frac{\Delta p}{\Delta t} = \frac{20{,}000}{5} = 4{,}000 \,\text{N} $$
En revanche, si le freinage se fait brutalement en seulement $ \Delta t = 0.1 \,\text{s}$, la force nécessaire devient gigantesque :
$$ F = \frac{\Delta p}{\Delta t} = \frac{20{,}000}{0.1} = 2{,}000{,}000 \,\text{N} $$
C’est pourquoi un choc violent engendre des forces colossales et provoque de graves dégâts, alors qu’un freinage progressif répartit l’effort sur une durée plus longue et réduit fortement l’impact.
Exemple 2
Une boule de bowling de masse $m_b = 7 \,\text{kg}$ roule à une vitesse de $v_b = 2 \,\text{m/s}$.
Sa quantité de mouvement est de 14 kg·m/s :
$$ p_b = m_b \cdot v_b = 7 \cdot 2 = 14 \,\text{kg·m/s} $$
Même à vitesse modeste, elle transporte assez de quantité de mouvement pour renverser facilement les quilles.
À l’inverse, une balle de ping-pong de masse $m_p = 0.0027 \,\text{kg}$ peut atteindre des vitesses de $v_p = 20 \,\text{m/s}$.
Sa quantité de mouvement n’est que de 0.054 kg·m/s :
$$ p_p = m_p \cdot v_p = 0.0027 \cdot 20 \approx 0.054 \,\text{kg·m/s} $$
En résumé, même lancée très vite, la balle transmet une quantité de mouvement infime et son impact est négligeable.
Cet exemple illustre pourquoi la quantité de mouvement est essentielle : dans une collision, masse et vitesse jouent un rôle aussi déterminant l’une que l’autre.
Masse constante et masse variable
Dans la plupart des problèmes de mécanique classique, on suppose la masse d’un corps constante. L’expression devient alors :
$$ \vec{p} = m \vec{v} $$
Ici, la masse $m$ est fixe et indépendante du temps.
Mais il existe des situations où la masse évolue avec le temps.
Exemple. Cas emblématique : une fusée éjectant son carburant. Au fur et à mesure de la propulsion, la masse du lanceur diminue pendant le vol.
Dans ces conditions, la deuxième loi de Newton s’écrit sous sa forme la plus générale :
$$ \vec{F} = \frac{d\vec{p}}{dt} = \frac{d}{dt}(m\vec{v}) $$
La masse dépend alors explicitement du temps.
$$ \vec{F} = m \frac{d\vec{v}}{dt} + \vec{v}\,\frac{dm}{dt} $$
Cette expression montre clairement qu’une variation de masse affecte le mouvement de la même manière qu’une accélération.
Exemple. Cas plus simple : une voiture dont le réservoir est plein au départ et presque vide à l’arrivée, ce qui réduit légèrement la masse totale. La différence est faible, mais le principe reste valable. Dans les systèmes où les pertes ou gains de masse sont significatifs (fusées, jets de fluide, sable s’écoulant d’un récipient, etc.), l’analyse de la quantité de mouvement doit se faire avec cette formulation générale.
Aux vitesses proches de celle de la lumière, il faut en outre prendre en compte les effets relativistes : selon la relativité restreinte d’Einstein, l’inertie d’un corps augmente avec sa vitesse.
Moment relativiste
Lorsque la vitesse d’un objet devient comparable à celle de la lumière, la mécanique classique ne suffit plus à décrire correctement son mouvement.
Dans la théorie de la relativité restreinte formulée par Einstein, la masse au repos $m_0$ demeure constante, mais la définition du moment prend une forme nouvelle, propre au cadre relativiste :
$$ \vec{p} = \gamma m_0 \vec{v} \qquad\text{où}\qquad \gamma = \frac{1}{\sqrt{1 - \frac{v^2}{c^2}}} $$
Pour des vitesses usuelles, on a $\gamma \approx 1$, et l’expression relativiste se ramène naturellement à la formule classique.
En revanche, lorsque la vitesse s’approche de celle de la lumière ($v \to c$), le facteur de Lorentz $\gamma$ augmente sans limite, et le moment croît dans la même proportion. Cela explique pourquoi aucun corps doté d’une masse au repos finie ne peut être accéléré jusqu’à la vitesse de la lumière.
Remarque. Dans les premières interprétations de la relativité, on employait souvent la notion de masse relativiste, définie par $ m_{\text{rel}} = \gamma m_0 $, pour rendre compte de l’accroissement du moment à grande vitesse. La physique moderne, en revanche, conserve la masse au repos $m_0$ comme constante et attribue l’augmentation de $\vec{p}$ exclusivement au facteur de Lorentz $\gamma$.
Dans la relation $ \vec{p} = \gamma m_0 \vec{v} $, le terme $\gamma \vec{v}$ présente la même structure mathématique que la vitesse propre $\vec{\eta} = d\vec{x}/d\tau$, définie par rapport au temps propre $\tau$ de l’objet.
Cependant, dans le contexte relativiste, ce terme correspond à la composante spatiale du quadri-vecteur vitesse $ U^\mu $ :
$$ U^\mu = (\gamma c,\ \gamma \vec{v}) = (\gamma c,\ \gamma v_x, \gamma v_y, \gamma v_z ) $$
Sa partie spatiale coïncide avec le facteur $\gamma \vec{v}$ de l’expression de $\vec{p}$, mais elle s’intègre dans une grandeur à quatre dimensions invariante, qui conserve la même norme pour tous les observateurs inertiels.
La conservation du quadri-vecteur moment $P^\mu = m_0 U^\mu$ garantit ainsi la conservation simultanée de l’énergie et du moment dans tout référentiel inertiel.
Le lien entre force et quantité de mouvement
La force se définit comme la dérivée temporelle de la quantité de mouvement : $$ \vec{F} = \frac{d \ \vec{p}}{dt} $$
Connaître la quantité de mouvement d’un corps permet donc de déterminer la force nécessaire pour le ralentir ou l’immobiliser.
La relation $F = dp/dt$ n’est en réalité qu’une forme généralisée de la deuxième loi de Newton $F = ma$.
Dérivation
En supposant la masse constante :
$$ \vec{p} = m \cdot \vec{v} $$
D’après la deuxième loi de Newton, la force est égale à la masse multipliée par l’accélération :
$$ \vec{F} = m \cdot \vec{a} $$
Or, comme l’accélération $a = dv/dt$, on obtient :
$$ \vec{F} = m \cdot \frac{d\vec{v}}{dt} $$
Avec $m$ constante, cela revient à :
$$ \vec{F} = \frac{d(m\vec{v})}{dt} = \frac{d\vec{p}}{dt} $$
Explication. La dérivée temporelle de la quantité de mouvement est $$ D[ \vec{p} ] = D[ m \cdot \vec{v} ] $$ Avec $m$ constante, $$ D[ \vec{p} ] = m \cdot D[ \vec{v} ] $$
et ainsi de suite.