Théorème de la dimension d’une base dans un espace vectoriel
Définition
Dans un espace vectoriel V défini sur un corps K, si V admet une base B composée d’un nombre fini d’éléments (autrement dit, si V est de dimension finie), alors toute autre base B' de V possède nécessairement le même nombre d’éléments.
Démonstration
Soit V un espace vectoriel admettant une base B constituée de n vecteurs :
$$ B = \{ v_1, \dots, v_n \} $$
Supposons, par l’absurde, qu’il existe une autre base B' comportant m vecteurs, avec m > n :
$$ B' = \{ v_1, \dots, v_n, v_{n+1}, \dots, v_m \} \quad \text{avec} \:\: m > n $$
D’après le théorème de complétion d’une base, on peut ajouter à B les m-n vecteurs supplémentaires de B' :
$$ \{ v_{n+1}, \dots, v_m \} $$
Mais cela conduit immédiatement à une contradiction.
En effet, si B est déjà une base de V à n éléments, elle forme un ensemble maximal de vecteurs linéairement indépendants.
Or, selon le théorème de dépendance linéaire relativement à une base, tout vecteur ajouté à B serait nécessairement linéairement dépendant des précédents.
Par conséquent, si B est une base, B' ne peut pas l’être, puisqu’elle contient m-n vecteurs dépendants.
Cela contredit la définition même d’une base, qui exige l’indépendance linéaire de ses éléments.
On en déduit que :
$$ m = n $$
Autrement dit, toutes les bases de V ont la même cardinalité. Si V admet une base à n éléments, aucune autre base ne peut en comporter davantage ou moins.
Remarque. On peut également établir le cas réciproque : il ne peut exister de base comportant moins de n vecteurs, car un tel ensemble ne saurait engendrer tout l’espace. Il faudrait alors le compléter en ajoutant n-k vecteurs linéairement indépendants.
Démonstration alternative
Considérons deux bases de l’espace vectoriel V :
- Une base génératrice de n vecteurs : $$ \{ v_1, v_2, \dots, v_n \} $$
- Un ensemble de p vecteurs linéairement indépendants : $$ \{ w_1, w_2, \dots, w_p \} $$
D’après le théorème sur l’indépendance linéaire, tout ensemble de vecteurs linéairement indépendants dans V contient au plus autant d’éléments qu’un ensemble générateur du même espace.
On a donc :
$$ p \le n $$
Mais puisque $\{v_1, \dots, v_n\}$ est une base - donc un ensemble générateur - et que $\{w_1, \dots, w_p\}$ en est une autre, les deux doivent engendrer le même espace, d’où également :
$$ n \le p $$
En combinant ces deux inégalités :
$$ \begin{cases} p \le n \\ \\ n \le p \end{cases} \Longleftrightarrow n = p $$
On conclut que les deux bases comportent le même nombre d’éléments : n = p.
Corollaires
Corollaire 1
Si un espace vectoriel V est de dimension n, il suffit de trouver n vecteurs linéairement indépendants pour former une base de V.
Corollaire 2
Si V est un espace vectoriel de dimension finie n sur un corps K, alors un sous-espace W ⊆ V est de dimension n si et seulement si W = V.
$$ \text{dim}(W) = \text{dim}(V) \:\: \text{si et seulement si} \:\: W = V $$
Démonstration
Soit W un sous-espace de V :
$$ W \subseteq V $$
$$ \text{dim}_K(W) = m $$
$$ \text{dim}_K(V) = n $$
D’après le théorème de dépendance linéaire, on a toujours m ≤ n.
Si, de plus, m = n, alors W possède une base de n vecteurs linéairement indépendants :
$$ B_W = \{ v_1, \dots, v_n \} $$
Comme W est inclus dans V, tous les vecteurs de BW appartiennent à V :
$$ B_W \subseteq V $$
Cela signifie que BW est aussi une base de V. Or, une même base ne peut engendrer à la fois un sous-espace propre et l’espace entier, sauf s’ils coïncident :
$$ W = V $$
Par suite, un sous-espace W a la même dimension que V si et seulement s’il lui est égal.
Corollaire 3 (Codimension)
Soit V un espace vectoriel sur un corps K, de dimension n, et W ⊆ V un sous-espace de dimension m. On appelle codimension de W dans V la différence entre leurs dimensions :
$$ \text{codim}_K(W) = \text{dim}_K(V) - \text{dim}_K(W) = n - m $$
Corollaire 4 (Théorème de Grassmann)
Soit V un espace vectoriel de dimension finie sur K, et soient A et B deux sous-espaces de V. On a en général :
$$ \text{dim}_K(A + B) = \text{dim}_K(A) + \text{dim}_K(B) - \text{dim}_K(A \cap B) $$
Cette formule ne s’applique pas lorsque A et B sont en somme directe, car leur intersection est alors triviale.
Corollaire 5
Le nombre de vecteurs d’une base dépend uniquement de l’espace vectoriel considéré, et non du choix particulier de la base.
Et ainsi de suite.