Transformer une base en une base orthogonale

Pour transformer n’importe quelle base de vecteurs en une base orthogonale, il suffit de projeter chaque vecteur sur les autres vecteurs non nuls en utilisant les coefficients de Fourier.

coefficients de Fourier

Le coefficient de Fourier se définit comme le rapport

$$ \frac{<v,w>} {<w,w>} $$

Les coefficients de Fourier jouent un rôle central dans la procédure d’orthogonalisation de Gram-Schmidt.

À partir de la projection Pw(v), on peut construire une base orthogonale à partir de n’importe quelle base grâce à la formule suivante :

$$ w_1 = v_1 $$ $$ w_i = v_i - \sum_{ j=1}^{i-1} P_wj(v_i) \:\:\:\: pour \:\:\:\: i=2,...n $$

Il est clair que la base orthogonale obtenue n’est pas unique : elle dépend de l’ordre dans lequel on choisit les vecteurs de la base initiale.

Remarque. La base orthogonale construite hérite de propriétés spécifiques issues de la méthode de Gram-Schmidt. En particulier, elle engendre le même espace vectoriel. De plus, si les vecteurs de départ sont linéairement indépendants, ils le resteront après transformation.

Une fois cette base orthogonale construite, on peut ensuite la transformer en une base orthonormée.

Les coefficients de Fourier

Dans l’espace vectoriel V=R2 défini sur K=R, considérons une base de vecteurs B formée des vecteurs suivants :

$$ B = \{ v , w \} = \{ ( 2,1 ) , ( 4,0 ) \} $$

Cette base n’est pas orthogonale, car le produit scalaire des deux vecteurs vaut 8.

$$ <v,w> = (2*4)+(1*0) = 8 $$

La représentation graphique dans le plan met immédiatement en évidence que ces vecteurs ne sont pas orthogonaux (ils ne sont pas perpendiculaires).

représentation graphique

Le produit scalaire induit la norme ||·|| sur l’espace vectoriel.

Pour transformer cette base en une base orthogonale, on considère la projection orthogonale Pw(v) du vecteur v sur w.

$$ P_w(v) = (2,0 ) $$

projection du vecteur v sur w

Le vecteur Pw(v) est un multiple de w, c’est-à-dire qu’il existe un scalaire k ∈ R tel que

$$ k \cdot P_w(v) = w $$

Remarque. Dans ce cas simple, la valeur du scalaire est immédiate : en multipliant Pw(v) par 2, on obtient w.

On calcule ensuite la différence entre v et sa projection orthogonale Pw(v) :

$$ v' = v - P_w(v) \\ v' = (2,1) - (2,0) \\ v' = (0,1) $$

Cette différence fournit un vecteur orthogonal à Pw(v).

Par commodité, on le note v'.

L’analyse graphique confirme aisément que v' est orthogonal à la projection Pw(v).

v' est orthogonal à w

Comme v' est orthogonal à w, on a :

$$ <v',P_w(v)> = 0 $$

En remplaçant v' par v - Pw(v), on obtient :

$$ <v',P_w(v)> = 0 \\ <v-P_w(v),P_w(v)> = 0 $$

D’après la troisième propriété du produit scalaire : $$ <a+b, c> = <a,c>+<b,c> $$

L’équation se réécrit alors ainsi :

$$ <v,P_w(v)> - <P_w(v),P_w(v)> = 0 $$

Or, comme Pw(v) est un multiple de w :

$$ P_w(v) = k \cdot w $$

On remplace donc Pw(v) par k · w :

$$ <v,kw> - <kw,kw> = 0 \\ <v,kw> - k<w,w> = 0 $$

D’après la quatrième propriété du produit scalaire : $$ <ka,b> = k<a,b>$$

L’équation devient alors :

$$ k \cdot <v,w> - k<w,w> = 0 $$

Sauf dans le cas trivial du vecteur nul (k = 0), que nous avons écarté, cette équation est vérifiée lorsque le scalaire k est donné par :

$$ k = \frac{<v,w>}{<w,w>} $$

Ce scalaire est appelé le coefficient de Fourier du vecteur v relativement à w.

La projection orthogonale de v sur w s’écrit donc :

$$ P_w(v) := \frac{<v,w>}{<w,w>} \cdot w = \frac{<v,w>}{||w^2||} \cdot w $$

Dans l’exemple précédent, le coefficient de Fourier est :

$$ k = \frac{<v,w>}{<w,w>} = \frac{ 8 }{ 16 } = \frac{ 1 }{ 2 } $$

On en déduit que la projection orthogonale de v sur w est :

$$ P_w(v) = \frac{<v,w>}{<w,w>} \cdot w = \frac{1}{2} \cdot (4,0) = (2,0) $$

Orthogonalisation de Gram-Schmidt

La méthode d’orthogonalisation de Gram-Schmidt permet d’exploiter les coefficients de Fourier afin de transformer n’importe quelle base de vecteurs en une base orthogonale.

Étant donné un système générateur L constitué de n vecteurs {vi} dans l’espace vectoriel V sur le corps K = R, on peut toujours construire un système générateur L' formé de n vecteurs mutuellement orthogonaux {wi} équivalent à L. $$ L\{v_1,...,v_n\} = L'\{w_1,...,w_n\} \\ <w_i,w_j>=0 \:\: pour \:\: i \ne j $$

Si les vecteurs du générateur initial L sont linéairement indépendants, ceux du générateur orthogonal L' le seront également.

Ainsi, si L est une base, alors L' constitue elle aussi une base.

Formule pour déterminer les vecteurs de la base orthogonale

Pour obtenir les vecteurs orthogonaux, la méthode repose sur la formule suivante :

Le premier vecteur v1 du générateur L est conservé tel quel (w1 = v1) dans le générateur L'. $$ w_1 = v_1 $$ Les vecteurs suivants sont orthogonalisés par projections successives à l’aide du coefficient de Fourier. $$ w_i = v_i - \sum_{ j=1}^{i-1} P_{wj}(v_i) \:\:\:\: pour \:\:\:\: i=2,...,n $$

On obtient ainsi une base orthogonale de l’espace vectoriel V.

Remarque. Cette base n’est évidemment pas unique : elle dépend de l’ordre dans lequel on choisit les vecteurs de la base initiale.

Exemple

Dans l’espace vectoriel V = R3 sur le corps K = R, considérons la base suivante :

$$ B = \{ v_1 , v_2, v_3 \} = \{ ( 1,1,1 ) , ( -1,1,0 ) , ( 1,2,1 ) \} $$

Ces trois vecteurs sont linéairement indépendants.

Ils ne sont toutefois pas orthogonaux, car leurs produits scalaires ne sont pas nuls et leurs normes ne valent pas 1.

Produits scalaires entre les vecteurs de la base :

$$ < v_1 , v_2 > = 1 \cdot -1 + 1 \cdot 1 + 1 \cdot 0 = 0 \\ < v_1 , v_3 > = 1 \cdot 1 + 1 \cdot 2 + 1 \cdot 1 = 4 \\ < v_2 , v_3 > = -1 \cdot 1 + 1 \cdot 2 + 0 \cdot 1 = 1 $$

Pour construire la base orthogonale B', on applique pas à pas la procédure de Gram-Schmidt :

$$ B' = \{ w_1 ,w_2,w_3 \} $$

Le premier vecteur de la base orthogonale est identique au premier vecteur de la base initiale :

$$ w_1 = v_1 = (1,1,1) $$

Le deuxième vecteur se calcule à l’aide de la formule de Gram-Schmidt :

$$ w_i = v_i - \sum_{ j=1}^{i-1} P_{wj}(v_i) \:\:\:\: pour \:\:\:\: i=2,...n $$

$$ w_2 = v_2 - \sum_{ j=1}^{2-1} P_{wj}(v_2) $$

$$ w_2 = v_2 - P_{w1}(v_2) $$

La projection orthogonale Pw1 du vecteur v2 s’écrit :

$$ P_{w1}(v_2) = \frac{<v_2,w_1>} {<w_1,w_1>} \cdot w_1 $$

$$ P_{w1}(v_2) = \frac{< ( -1,1,0 ) , (1,1,1) >} {< (1,1,1) , (1,1,1) >} \cdot (1,1,1) $$

$$ P_{w1}(v_2) = \frac{ -1 \cdot 1 + 1 \cdot 1 + 0 \cdot 0 } { 1^2 + 1^2 + 1^2 } \cdot (1,1,1) $$

$$ P_{w1}(v_2) = \frac{ 0 } { 3 } \cdot (1,1,1) $$

$$ P_{w1}(v_2) = 0 $$

D’où le vecteur w2 :

$$ w_2 = v_2 - P_{w1}(v_2) = ( -1,1,0 ) $$

On passe alors au calcul du troisième vecteur w3 :

$$ w_3 = v_3 - P_{w1}(v_3) - P_{w2}(v_3) $$

Projection Pw1(v3) :

$$ P_{w1}(v_3) = \frac{4}{3} \cdot (1,1,1) = \left( \frac{4}{3}, \frac{4}{3}, \frac{4}{3} \right) $$

Projection Pw2(v3) :

$$ P_{w2}(v_3) = \frac{1}{2} \cdot ( -1,1,0 ) = \left( - \frac{1}{2}, \frac{1}{2}, 0 \right) $$

On obtient donc :

$$ w_3 = (1,2,1) - \left( \frac{4}{3}, \frac{4}{3}, \frac{4}{3} \right) - \left( - \frac{1}{2}, \frac{1}{2}, 0 \right) $$

$$ w_3 = \left( 1 - \frac{4}{3} + \frac{1}{2}, 2 - \frac{4}{3} - \frac{1}{2}, 1 - \frac{4}{3} \right) $$

$$ w_3 = \left( \frac{1}{6}, \frac{1}{6}, - \frac{1}{3} \right) $$

La base orthogonale obtenue est donc :

$$ B' = \{ (1,1,1), (-1,1,0), \left( \frac{1}{6}, \frac{1}{6}, - \frac{1}{3} \right) \} $$

Remarque. Il ne s’agit que d’une des nombreuses bases orthogonales possibles : si l’on change l’ordre des vecteurs de la base B, on obtient une autre base orthogonale.

Vérification

Vérifions que les produits scalaires entre w1, w2 et w3 sont bien nuls :

$$ < w_1 ,w_2 > = 0 \\ < w_1 , w_3 > = 0 \\ < w_2 ,w_3 > = 0 $$

Ils s’annulent tous, ce qui confirme que w1, w2 et w3 sont mutuellement orthogonaux.

Les vecteurs w1, w2, w3 sont-ils orthonormés ?

Non, car leurs normes ne sont pas égales à 1 :

$$ || w_1 || = \sqrt{3} \\ || w_2 || = \sqrt{2} \\ || w_3 || = \sqrt{ \frac{1}{6} } $$

Il est toutefois possible de transformer cette base orthogonale en une base orthonormée en normalisant chaque vecteur.

Voir également cet autre exemple sur la procédure permettant de transformer une base orthogonale en une base orthonormée.

 


 

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