Particules de spin 1/2

Les particules de spin \( \tfrac{1}{2} \) possèdent une propriété fascinante : leur spin ne se réduit jamais à une simple étiquette. Il dépend de l'axe sur lequel on le mesure. En mécanique quantique, un état n'est pas un objet unique mais une superposition des deux états fondamentaux associés à l'opérateur \( S_z \). Cette superposition se note à l'aide d'un spinor \( (\alpha,\ \beta) \). $$ \begin{pmatrix} \alpha \\ \beta \end{pmatrix} = \alpha \begin{pmatrix} 1 \\ 0 \end{pmatrix} + \beta \begin{pmatrix} 0 \\ 1 \end{pmatrix} $$ Les amplitudes complexes \( \alpha \) et \( \beta \) indiquent respectivement la contribution des états « spin vers le haut » et « spin vers le bas » selon l'axe \( z \).

Un point essentiel à retenir est que « spin vers le haut » n'a de sens qu'en référence à un axe donné. Un même état peut apparaître très différent dès qu'on change d'orientation, par exemple si l'on passe de l'axe \( z \) à l'axe \( x \) ou à l'axe \( y \).

Les probabilités obtenues lors d'une mesure dépendent directement des amplitudes du spinor. Ces probabilités n'ont de sens que dans la base utilisée pour représenter l'état.

Changer l'axe de mesure revient donc à changer la base. On obtient alors de nouvelles amplitudes et, en conséquence, de nouvelles probabilités. Cela explique par exemple pourquoi une particule préparée en « spin vers le haut » selon \( z \) peut donner des résultats parfaitement équilibrés lors d'une mesure suivant \( x \).

Comprendre le comportement d'un spin 1/2

Les systèmes de spin \( \tfrac{1}{2} \) sont omniprésents en physique quantique. On les retrouve chez l'électron, le proton ou encore le neutron. Dans tous les cas, le nombre quantique magnétique \( m_s \) ne peut prendre que deux valeurs :

  • \( m_s = \tfrac{1}{2} \), projection positive
  • \( m_s = -\tfrac{1}{2} \), projection négative

Mais ces deux valeurs ne suffisent pas à décrire toute la richesse d'un spin. Un état de spin peut en réalité s'orienter dans n'importe quelle direction de l'espace. Pour cela, il s'exprime comme une superposition des deux états propres de \( S_z \).

$$ \begin{pmatrix} \alpha \\ \beta \end{pmatrix} = \alpha \begin{pmatrix} 1 \\ 0 \end{pmatrix} + \beta \begin{pmatrix} 0 \\ 1 \end{pmatrix} $$

Ce vecteur à deux composantes est appelé un spinor. Il constitue la représentation la plus courante des états de spin 1/2.

Nota. Les spinors de base sont les états propres de l'opérateur \( S_z \). $$ \begin{pmatrix} 1 \\ 0 \end{pmatrix} = \left| \tfrac{1}{2}, \tfrac{1}{2} \right\rangle $$ $$ \begin{pmatrix} 0 \\ 1 \end{pmatrix} = \left| \tfrac{1}{2}, -\tfrac{1}{2} \right\rangle $$ L'opérateur $$ S_z = \frac{\hbar}{2} \begin{pmatrix} 1 & 0 \\ 0 & -1 \end{pmatrix} $$ possède ces deux spinors comme états propres, avec les valeurs propres : $$ S_z \begin{pmatrix}1 \\ 0\end{pmatrix} = +\tfrac{1}{2}\hbar $$ $$ S_z \begin{pmatrix}0 \\ 1\end{pmatrix} = -\tfrac{1}{2}\hbar $$ Le spinor décrit l'état quantique, tandis que l'opérateur \( S_z \) en fournit la projection quantifiée sur l'axe \( z \).

Les coefficients \( \alpha \) et \( \beta \) reflètent le poids de chaque état propre dans la superposition. Leur interprétation est probabiliste :

  • \( |\alpha|^2 \) représente la probabilité d'obtenir la projection positive suivant \( z \)
  • \( |\beta|^2 \) représente la probabilité d'obtenir la projection négative suivant \( z \)

Comme toujours en mécanique quantique, la normalisation impose :

$$ |\alpha|^2 + |\beta|^2 = 1 $$

Mesurer le spin selon l'axe x

Un aspect fondamental du spin est que les états propres de \( S_x \) ne sont pas les mêmes que ceux de \( S_z \). Pour prédire les résultats d'une mesure suivant \( x \), il faut donc exprimer l'état dans la base de \( S_x \).

Le changement de base conduit à deux nouvelles amplitudes :

$$ a = \frac{\alpha + \beta}{\sqrt{2}} $$

$$ b = \frac{\alpha - \beta}{\sqrt{2}} $$

Ces amplitudes s'interprètent exactement comme dans le cas précédent :

  • \( |a|^2 \) est la probabilité d'obtenir la projection positive suivant \( x \)
  • \( |b|^2 \) est la probabilité d'obtenir la projection négative suivant \( x \)

Pour rendre l'idée plus concrète, prenons une particule préparée dans l'état « spin vers le haut » selon \( z \) :

$$ (\alpha,\ \beta) = (1,0) $$

On applique le changement de base :

$$ a = \frac{1+0}{\sqrt{2}} = \frac{1}{\sqrt{2}} $$

$$ b = \frac{1-0}{\sqrt{2}} = \frac{1}{\sqrt{2}} $$

Les probabilités finales sont alors :

$$ |a|^2 = \tfrac{1}{2} $$

$$ |b|^2 = \tfrac{1}{2} $$

La mesure suivant \( x \) donne donc un résultat parfaitement équilibré :

  • 50 pour cent de probabilité de mesurer la projection positive
  • 50 pour cent de probabilité de mesurer la projection négative

Ce comportement est confirmé par l'expérience de Stern et Gerlach, un repère historique dans l'étude du spin.

La conclusion principale est simple. Un état « spin vers le haut » pour un axe donné ne garantit rien pour un autre axe. Changer d'axe modifie la base de description de l'état, ses amplitudes et les probabilités des résultats.

Pour compléter le tableau, voici les trois opérateurs de spin dont les états propres structurent la dynamique du spin dans l'espace quantique :

$$
\hat S_x = \frac{\hbar}{2}
\begin{pmatrix}
0 & 1 \\
1 & 0
\end{pmatrix} $$

$$ \hat S_y = \frac{\hbar}{2}
\begin{pmatrix}
0 & -i \\
i & 0
\end{pmatrix} $$

$$ \hat S_z = \frac{\hbar}{2}
\begin{pmatrix}
1 & 0 \\
0 & -1
\end{pmatrix} $$

Nota. Dans les systèmes de spin \( \tfrac{1}{2} \), un phénomène souvent déroutant se produit : une rotation complète de \( 360^\circ \) ne ramène pas l'état quantique à lui-même, mais à son opposé. On l'exprime simplement par \[ U(2\pi)\,|\psi\rangle = -|\psi\rangle \] Ce paradoxe apparent ne concerne pas l'orientation physique du spin, qui reste identique. Ce qui change est la phase globale du spinor, qui acquiert un signe négatif. Pour retrouver exactement le même état quantique, il faut deux tours complets, soit une rotation de \( 720^\circ \). Cette propriété n'est pas anecdotique. Elle révèle que ces particules doivent être décrites par le groupe SU(2), et non par SO(3). Les matrices de Pauli sont les générateurs naturels de ces transformations. Ce sont les seules matrices \( 2\times2 \) capables de décrire de manière cohérente les rotations dans un système de spin 1/2 :

$$ \sigma_x = \begin{pmatrix} 0 & 1 \\ 1 & 0 \end{pmatrix} $$ $$ \sigma_y = \begin{pmatrix} 0 & -i \\ i & 0 \end{pmatrix} $$ $$ \sigma_z = \begin{pmatrix} 1 & 0 \\ 0 & -1 \end{pmatrix} $$

Pour mieux saisir ce comportement, prenons un exemple concret. Considérons le spinor :

\[ \psi = \begin{pmatrix} 0.6 \\ 0.8 \end{pmatrix} \]

Si l'on applique la matrice \( -I \), correspondant à une rotation de \( 360^\circ \), on obtient :

\[ (-I)\psi = \begin{pmatrix} -0.6 \\ -0.8 \end{pmatrix}. \]

Du point de vue physique, rien n'a changé. Les probabilités restent exactement les mêmes :

$$ |0.6|^2 = 0.36 \qquad |-0.6|^2 = 0.36 $$ $$ |0.8|^2 = 0.64 \qquad |-0.8|^2 = 0.64 $$

Ce simple exemple montre que le signe global d'un spinor n'a aucune conséquence observable. En revanche, il met clairement en lumière la nature profonde du spin dans la mécanique quantique.

Cette même idée permet de comprendre pourquoi l'état \( \begin{pmatrix}1 \\ 0\end{pmatrix} \), qui représente le « spin vers le haut » suivant l'axe \( z \), n'est pas un autovecteur de \( \hat S_x \) ni de \( \hat S_y \). Pour mesurer le spin selon un autre axe, il faut réexprimer l'état dans la base correspondante. Chaque axe possède son propre couple d'états « haut » et « bas », et ceux-ci ne coïncident jamais entre eux.

Il en résulte que deux mesures de spin selon des axes différents peuvent fournir des résultats très différents, même si l'on part exactement du même spinor. Le changement d'axe implique un véritable changement de base dans l'espace des états.

Les autovecteurs de \( S_x \) et le changement de base en spin 1/2

Tout spinor \( (\alpha,\beta) \) peut être réécrit dans la base propre de \( S_x \). Cette réécriture est indispensable pour déterminer les probabilités lorsqu'on effectue une mesure suivant cet axe :

$$ \begin{pmatrix}\alpha \\ \beta\end{pmatrix} = a \begin{pmatrix} \tfrac{1}{\sqrt{2}} \\ \tfrac{1}{\sqrt{2}} \end{pmatrix} + b \begin{pmatrix} \tfrac{1}{\sqrt{2}} \\ -\tfrac{1}{\sqrt{2}}\end{pmatrix} $$

Les autovecteurs de \( S_x \) sont :

  • $ \chi_+ = \begin{pmatrix}\tfrac{1}{\sqrt{2}} \\ \tfrac{1}{\sqrt{2}}\end{pmatrix} $
  • $ \chi_- = \begin{pmatrix}\tfrac{1}{\sqrt{2}} \\ -\tfrac{1}{\sqrt{2}}\end{pmatrix} $

Les coefficients d'expansion associés s'obtiennent naturellement :

  • $ a = \dfrac{\alpha + \beta}{\sqrt{2}} $
  • $ b = \dfrac{\alpha - \beta}{\sqrt{2}} $

D'où viennent ces autovecteurs.

L'opérateur utilisé est :

$$ S_x = \frac{\hbar}{2}\begin{pmatrix} 0 & 1 \\ 1 & 0 \end{pmatrix} $$

Comme le facteur \( \hbar/2 \) ne modifie pas la forme des autovecteurs, on travaille directement avec la matrice :

$$ M = \begin{pmatrix} 0 & 1 \\ 1 & 0 \end{pmatrix} $$

qui correspond à la matrice de Pauli \( \sigma_x \).

Les valeurs propres se trouvent en résolvant :

$$ \det(M - \lambda I)=0 $$

ce qui donne :

$$ \lambda^2 - 1 = 0 \Rightarrow \lambda = \pm 1 $$

Autovecteur pour \( \lambda = +1 \)

La résolution de \( (M - I)v = 0 \) donne un vecteur proportionnel à \( (1,1) \), qui se normalise en :

$$ \chi_+ = \begin{pmatrix} \tfrac{1}{\sqrt{2}} \\ \tfrac{1}{\sqrt{2}} \end{pmatrix} $$

Autovecteur pour \( \lambda = -1 \)

La résolution de \( (M + I)v = 0 \) conduit à un vecteur proportionnel à \( (1,-1) \), qui après normalisation devient :

$$ \chi_- = \begin{pmatrix} \tfrac{1}{\sqrt{2}} \\ -\tfrac{1}{\sqrt{2}} \end{pmatrix} $$

Calcul direct de \( a \) et \( b \).

La réécriture du spinor dans la base de \( S_x \) donne le système :

$$ \begin{cases} \alpha = \tfrac{a+b}{\sqrt{2}} \\ \beta = \tfrac{a-b}{\sqrt{2}} \end{cases} $$

En additionnant les deux équations, on obtient :

$$ a = \dfrac{\alpha + \beta}{\sqrt{2}} $$

En les soustrayant, on trouve :

$$ b = \dfrac{\alpha - \beta}{\sqrt{2}} $$

Ces résultats permettent d'analyser précisément tout changement de base dans un système de spin 1/2 et de comprendre comment les probabilités de mesure évoluent selon l'axe choisi.

 


 

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