Les collisions de particules
Quand deux particules entrent en collision, l’Univers met en scène l’un de ses spectacles les plus fascinants. En une fraction infime de seconde, elles peuvent rebondir, échanger de l’énergie ou se transformer en nouvelles particules. Un véritable laboratoire miniature où se révèlent les lois les plus profondes de la physique.
En physique moderne, une collision n’est pas un choc matériel comme entre deux billes, mais une interaction entre champs. À l’échelle subatomique, tout se joue dans l’échange d’énergie et de forces entre les composants fondamentaux de la matière.
En réalité, les particules ne se « touchent » jamais. Elles interagissent à distance en échangeant des bosons médiateurs : les photons transmettent la force électromagnétique, les gluons assurent la cohésion du noyau atomique, et les bosons W et Z provoquent certaines désintégrations liées à la force faible.
Les lois de conservation
Lorsqu’une collision se produit entre particules, la nature ne laisse rien au hasard. Elle obéit à des principes fondamentaux, les lois de conservation, qui assurent que certaines grandeurs physiques restent inchangées, quelles que soient la violence ou la complexité de l’interaction. Ces lois, au cœur de la physique relativiste, traduisent une idée essentielle : tout ce qui existe se transforme, mais rien ne se perd.
- La conservation de l’énergie totale
L’énergie totale d’un système reste identique avant et après la collision.Prenons un exemple : lors d’un choc entre particules, l’énergie totale du système demeure constante. Autrement dit, la somme des énergies avant l’impact est égale à celle après : $$ E_1 + E_2 = E_3 + E_4 $$ Les particules issues de la collision (3 et 4) peuvent être les mêmes que celles initiales (1 et 2) ou de nouvelles particules formées au moment du choc. Si les particules ne changent pas, on parle de collision élastique ; si elles se transforment, on a une réaction inélastique, où une partie de l’énergie cinétique est convertie en masse ou en énergie interne.
- La conservation de la quantité de mouvement
La quantité de mouvement totale du système reste également constante, même si la direction ou la répartition changent.De la même manière que l’énergie, la quantité de mouvement ne varie pas pendant une collision. Elle s’exprime ainsi : $$ \vec{p}_1 + \vec{p}_2 = \vec{p}_3 + \vec{p}_4 $$ où $p_1$ et $p_2$ sont les quantités de mouvement des particules avant le choc, et $p_3$, $p_4$ celles des particules après. Cette équation résume un principe fondamental : le mouvement ne se crée pas, il se partage.
- La conservation de la charge électrique et des nombres quantiques
Certaines grandeurs, comme la charge électrique, le nombre baryonique ou le nombre leptonique, restent elles aussi invariantes. Dans l’univers, rien ne peut “apparaître” ou “disparaître” sans respecter ces règles : tout se conserve, jusque dans les interactions les plus extrêmes.
En résumé, les grandeurs essentielles - énergie, quantité de mouvement et charge - demeurent constantes dans toute interaction. La seule exception est l’énergie cinétique $K$, qui peut varier selon la nature du choc.
À retenir : En relativité restreinte, la conservation de l’énergie et celle de la quantité de mouvement se combinent dans une formule unifiée et élégante, grâce au quadrivecteur énergie - moment : $$ P_1 + P_2 = P_3 + P_4 $$ Chaque terme ($P_i$) représente un quadrivecteur de la forme $$ P_i = \left( \frac{E_i}{c},\ \vec{p}_i \right) $$ qui regroupe énergie et quantité de mouvement en une seule entité. Cette approche, valable dans tous les référentiels inertiels, décrit aussi bien les collisions élastiques que les processus de création et d’annihilation de particules, où l’énergie cinétique peut se transformer en masse, ou inversement.
Physique classique vs physique relativiste
En physique classique, les lois de conservation s’expriment différemment. Lorsqu’un choc a lieu entre deux corps, la quantité de mouvement totale se conserve, mais une partie de l’énergie cinétique se dissipe - sous forme de chaleur, de son ou de déformation. En relativité, le principe reste le même, mais la manière de le décrire change profondément.
En mécanique classique, la masse totale d’un système se conserve toujours :
$$ m_1 + m_2 = m_3 + m_4 $$
Autrement dit, la masse ne se crée pas et ne disparaît pas : elle se répartit simplement entre les objets en interaction.
La physique relativiste bouleverse ce principe. Elle montre que la masse et l’énergie sont deux facettes d’une même réalité, reliées par la célèbre équation d’Einstein:
$$ E = mc^2 $$
Cette idée a révolutionné notre compréhension du monde. En physique classique, la masse est une quantité fixe; en physique relativiste, c’est l’énergie totale - comprenant à la fois l’énergie cinétique et l’énergie liée à la masse au repos - qui reste réellement constante. Ce changement de perspective ouvre la voie à la physique moderne, celle où l’énergie peut se transformer en matière… et la matière en énergie.
En physique relativiste, les anciennes distinctions entre énergie mécanique, thermique ou élastique perdent leur sens. Tout devient plus cohérent : l'énergie totale d'une particule résulte de deux formes indissociables - l'énergie de repos, liée à sa masse, et l'énergie cinétique, liée à son mouvement. Ensemble, elles définissent son état énergétique complet.
Les différents types de collisions
Les collisions entre particules font partie des phénomènes les plus spectaculaires de la physique moderne. Elles révèlent comment l'énergie peut se transmettre, se transformer ou même donner naissance à de nouvelles particules. On distingue trois grands types de collisions :
- Les collisions élastiques
Ici, rien ne se perd : l'énergie cinétique totale du système reste parfaitement conservée. Les particules se percutent, se dévient, mais restent les mêmes - aucune ne disparaît, aucune ne se transforme.Un exemple classique est la diffusion élastique d'un électron sur un proton : $$ p + e \rightarrow p + e $$ Après la collision, le proton et l'électron repartent intacts, avec la même masse et la même identité. Dans le référentiel du centre de masse, l'énergie cinétique totale demeure inchangée.
- Les collisions inélastiques (ou adhésives)
Dans ce cas, une partie de l'énergie cinétique initiale est transformée en d'autres formes d'énergie interne : chaleur, excitation ou énergie de liaison. Autrement dit, une portion du mouvement devient matière.Un exemple typique est la fusion nucléaire : deux noyaux s'assemblent pour en former un plus lourd. Une partie de leur énergie cinétique se convertit alors en énergie de liaison, libérant une quantité d'énergie colossale - c'est le principe au cœur du Soleil.
- Les collisions explosives (ou désintégrations)
Cette fois, c'est l'inverse : une seule particule se fragmente en plusieurs particules plus légères qui s'éloignent à grande vitesse. Une partie de sa masse se transforme en énergie cinétique, selon la célèbre équation d'Einstein $E = mc^2$.Par exemple, un neutron peut se désintégrer en un proton, un électron et un antineutrino : $$ n \rightarrow p + e^- + \bar{\nu}_e $$ Une fraction de la masse du neutron se convertit alors en énergie cinétique, propulsant les particules issues de la désintégration.
Ces trois scénarios montrent à quel point matière et énergie sont étroitement liées. Dans le monde relativiste, chaque interaction - qu'il s'agisse d'une fusion, d'une collision ou d'une désintégration - révèle la profonde unité entre la masse, le mouvement et l'énergie.
Quand la masse devient énergie
À des énergies extrêmement élevées, les collisions révèlent une idée fondamentale de la physique : la masse et l’énergie sont deux formes d’une même réalité.
Après une collision, la masse totale peut varier, mais la somme de l’énergie et de la quantité de mouvement reste constante. Une partie de l’énergie cinétique peut se transformer en masse - donnant naissance à de nouvelles particules issues de l’énergie pure -, et le processus inverse peut également se produire.
Exemple concret
Dans les grands accélérateurs de particules, comme le Grand