Règle OZI

La règle OZI énonce qu’un processus de désintégration est fortement supprimé (c’est-à-dire qu’il se produit avec une probabilité très faible) si son diagramme de Feynman peut être scindé en deux parties distinctes en ne coupant que des lignes de gluons. Ces désintégrations ne sont pas interdites, mais elles surviennent beaucoup moins souvent que ce que l’on pourrait normalement attendre.

Lorsque les quarks de la particule initiale peuvent se réarranger directement pour former les produits finaux, la désintégration se déroule sans difficulté, même si ce canal n’est pas le plus favorable sur le plan énergétique.

En revanche, si les quarks initiaux doivent d’abord s’annihiler complètement en gluons - lesquels génèrent ensuite de nouvelles paires quark-antiquark -, le processus devient bien moins probable (suppression OZI). Cela s’explique par le fait que les gluons de haute énergie interagissent faiblement, conséquence directe de la liberté asymptotique en QCD.

En termes simples, une désintégration forte dans laquelle les quarks constitutifs se recombinent directement en nouvelles particules est bien plus probable qu’un processus nécessitant leur annihilation préalable en gluons suivie de la création de nouvelles paires de quarks.

C’est pourquoi les diagrammes de Feynman qui peuvent être séparés en ne coupant que les lignes de gluons correspondent à des processus fortement supprimés : c’est précisément l’essence de la règle OZI.

Remarque. La règle doit son nom à trois physiciens théoriciens : Susumu Okubo, George Zweig et Jugoro Iizuka. Dans les années 1960, en étudiant les données de désintégration des mésons, ils mirent en évidence une anomalie : certains canaux, bien que permis par la conservation de l’énergie et par les principes de symétrie, se produisaient beaucoup plus rarement que prévu. Pour expliquer ce paradoxe, ils formulèrent ce que l’on appelle aujourd’hui la règle OZI. Celle-ci éclaire pourquoi certaines désintégrations qui devraient théoriquement être qualifiées de « fortes » apparaissent en pratique extrêmement improbables : tout dépend de la possibilité pour les quarks de se réorganiser directement en états finaux, ou au contraire de devoir passer par une annihilation gluonique.

    Un exemple concret

    Le méson $\phi$ est formé d’une paire $s\bar{s}$ et possède une masse d’environ $1020 \,\text{MeV}/c^2$.

    Ses principaux canaux de désintégration sont les suivants :

    • Désintégration en deux kaons
      Dans les canaux $\phi \to K^+K^-$ ou $\phi \to K^0\bar{K}^0$, la paire $s\bar{s}$ du méson $\phi$ se réarrange directement pour donner deux kaons, sans passer par une annihilation en gluons. $$ \phi \;\;\to\;\; K^+K^- \quad \text{ou} \quad K^0\bar{K}^0 $$ Chaque kaon a une masse d’environ $495 \,\text{MeV}/c^2$, soit un état final combiné de près de $990 \,\text{MeV}/c^2$. Bien que ce canal ne soit pas particulièrement avantageux du point de vue énergétique, il est très simple au niveau des quarks : la paire $s\bar{s}$ du $\phi$ s’associe à une paire $u\bar{u}$ créée par un gluon, produisant ainsi deux kaons. C’est le mode de désintégration dominant observé expérimentalement.
      exemple : désintégration du méson phi en kaons
    • Désintégration en trois pions
      Le $\phi$ peut aussi se désintégrer en trois pions, $\pi^+\pi^-\pi^0$ : $$ \phi \;\;\to\;\; \pi^+\pi^-\pi^0 $$ Les trois pions réunis représentent une masse d’environ $405 \,\text{MeV}/c^2$. Énergétiquement, ce canal est donc plus favorable que celui en deux kaons, puisque la masse finale est plus faible. Cependant, les pions sont constitués de quarks $u$ et $d$, tandis que le $\phi$ est composé d’un couple $s\bar{s}$. Pour les produire, la paire $s\bar{s}$ doit d’abord s’annihiler en gluons, qui génèrent ensuite des paires $u\bar{u}$ et $d\bar{d}$. Ces dernières se recombinent pour donner trois pions. Bien que possible sur le plan énergétique, ce mécanisme est fortement supprimé par la règle OZI et demeure donc extrêmement rare. En termes de diagrammes de Feynman, le processus peut être scindé en deux parties en ne coupant que les lignes de gluons, conformément à la règle OZI.
      exemple : désintégration du méson phi en pions (supprimée par OZI)

    En conclusion, le méson $\phi$ se désintègre principalement en deux kaons, bien que le canal à trois pions soit plus favorable du point de vue énergétique.

    L’explication est claire : la désintégration en deux kaons réutilise directement les quarks initiaux, tandis que la désintégration en trois pions exige leur annihilation en gluons et la création de nouvelles paires de quarks.

     

     


     

    Please feel free to point out any errors or typos, or share suggestions to improve these notes.

    FacebookTwitterLinkedinLinkedin

    Physique des particules

    Particules

    Questions fréquentes